Equateur, la pochette surprise

09/04/2013 23:54

OTAVALO

Après le passage de la frontière avec la Colombie, nous nous sommes reposés 2 jours à Tulcàn avant de commencer notre voyage en Equateur. Notre première étape, la ville d’Otavalo.

C’est une ville de fourmis que nous découvrons. Une large part de la population est constituée d’Indigènes, qui portent leur vêtement traditionnel. Pour les femmes, il se constitue d’un chapeau noir en feutre, d’une longue jupe portefeuille noire, d’une blouse blanche aux manches bouffantes décorée de broderies multicolores, d’une ceinture colorée, et de colliers multi-rangs dorés. Leurs chaussures ressemblent à des petites espadrilles noires en velours. Les hommes ont les mêmes chaussures mais blanches, un pantalon blanc, parfois un poncho et un chapeau. Ils sont beaux, et ça fait du bien de voir des traditions régionales si bien conservées. L’uniformisme vestimentaire de nos contrées est bien triste par rapport à ce spectacle.

Et c’est un vrai spectacle que des les observer, car ils passent leur temps à courir d’un point à un autre, souvent bien chargés. Les femmes portent presque toutes un bébé sur le dos, bien emmailloté dans une sorte de châle, quand ce n’est pas 40 kg de carottes ou de pommes de terre. C’est pour ça qu’avec leur petite taille, leurs jupes noires et leurs chapeaux foncés, on dirait des fourmis.

La ville est faite de ce curieux mélange de calme tranquille et d’agitation frénétique.

Nous découvrons avec enchantement le marché du samedi, qui occupe presque toutes les rues de la ville. Etals de tissus, ponchos, bonnets en laine, tapis, instruments de musique, bijoux, poteries, chapeaux…la concurrence est rude, mais les visages partout souriants. Un peu plus loin ce sont les étals de nourriture : frites, cochon grillée, poulet, fruits et légumes,… Un savoureux mélange d’odeurs et de couleurs, bercé par le son des Andes profondes des flûtes de pan. Les rues sont pleines dès 8h, bien que la nuit fût courte après les festivités de la semaine sainte.

Nous avons eu l’occasion d’en découvrir une partie à Iluman, village autrement réputé pour ses articles en cuir. Nous sommes arrivés en pleine procession le vendredi saint. Tout le monde suivait le cortège qui ramenait la Sainte vierge à son église d’origine. Les retardataires arrivaient en courant afin de ne rien louper de l’évènement. Il faut dire que les préparatifs avaient mis en toutes les populations catholiques du continent en émoi, et l’agitation fébrile de tout le monde nous avait déjà préparés au défilé. Tout le monde était sur son trente-et-un, des plus jeunes aux plus anciens.

Otavalo n’est pas seulement intéressante par son métissage bigarré, elle l’est aussi par sa position : les montagnes de la Cordillères des Andes qui l’entourent sont superbes. D’ailleurs la route qui y mène offre un panorama époustouflant : vallées encaissées et dénivelés de plus de 1 000 mètres sont monnaies courantes pour des pentes très vertes et bien apprivoisées par leurs habitants malgré leur raideur.

Depuis Otavalo, on voit l’Imbabura, volcan éteint qui culmine à 4 620 mètres et le Cotocachi à 4 940 mètres. C’est vers ce dernier que nous décidons de nous approcher lors d’une excursion.

Celle-ci commence par une promenade à la cascade de Peguche. Elle est mystique pour les Indigènes qui s’y regroupent tous les 22 juin pour le solstice d’été, qui marquent pour eux le début de l’année. Et oui, leur calendrier est basé sur celui du soleil. Nous déclinons une baignade dans ses eaux a priori bienfaisantes, mais d’une température bien trop fraîche pour nous. L’air lui-même est bien plus frais, nous sommes tout de même à plus de 2 500 mètres d’altitude. Après avoir croisé Grand-Mère Feuillage (ou l’arbre aux âmes pour ceux qui ne connaissent pas Pocahontas), nous nous rendons à la lagune de Cuicocha.

Elle est logée dans un cratère affaissé aux pieds de l’imposant Cotocachi. La vue est superbe, une fois de plus, et l’Imbabura nous fait même l’honneur de dégager sa cime habituellement noyée dans les brouillards de haute altitude. Le paysage grandiose nous rappelle la puissance de ces géants autrefois en éveil, qui devaient faire trembler les vallées, tout en modelant une géomorphologie impressionnante. Emplis d’admiration nous quittons ce lieu magique pour Cotocachi, un village indigène qui a fait sa fortune du tissage de la laine.

Nous pénétrons dans un atelier plutôt sombre, tenu par un couple marqué par les années de labeur, mais souriant, très accueillant, se lançant des boutades tout en étant à leur ouvrage. De la belle ouvrage d’ailleurs ! (n’est-ce pas Madame Grenier ??!!). Ils nous racontent en paroles et en images comment filer la laine et la tisser. Monsieur est fier de nous montrer son travail, et plus encore, accroupi par terre, de nous expliquer qu’il a 80 ans. Nous leur achetons un châle et une écharpe, bien plus intéressants que ceux du marché de la ville qui viennent d’ateliers mécanisés. Ici, tout se fait manuellement depuis des temps immémoriaux. Sous leurs adieux bienveillants, nous regagnons Otavalo.

Nous repartons ensuite à Guayllabamba, aux alentours de la ville, pour faire un tour au parc zoologique afin de voir enfin un jaguar et un toucan. Nous rencontrons également des lamas. Johann, fort de son pari avec Toto « Je te paie une bière si tu arrives à te faire cracher dessus par un lama », commence à défier l’animal. Regard en coin, crachat par terre, défi du regard…bref je sens que ça prend mais pas de réponse du camélidé. J’abandonne. Un soigneur apporte le déjeuner des lamas à base de carottes. L’animal ne m’a pas oublié et me recrache vivement et de loin (5 mètres au moins) son repas en pleine tempe...Alix est morte de rire mais moi j’ai réussi mon pari. A bon entendeur Toto, rendez-vous à l’apéro…

Après le zoo, nous avons goûté à un plat typique équatorien : le locro de papas. C’est très bon (et très nourrissant) : il s’agit d’une soupe de pommes de terre, à l’avocat et au fromage de brebis.

Garnis de cette délicatesse culinaire, nous retournons faire nos sacs à Otavalo avant le départ pour Quito.

 

QUITO

Le trajet en bus dure à peine 2 heures (pour une fois !), et offre toujours une vue époustouflante sur la Cordillère. Décidément cette Cordillère, elle nous plaît !!

 La capitale est elle aussi logée à une altitude andine (2 850 mètres). Relativement bien installés dans un hôtel (on a l’eau chaude), nous partons explorer la vieille ville. Elle est beaucoup plus agréable que celle de Bogotà. Nous flânons donc d’une église à l’autre à la recherche de celle qui contiendrait 7 tonnes d’or (sacrés Jésuites !). Au loin la Vierge domine au sommet du Panecillo, à laquelle fait face l’imposante basilique néogothique del Voto Nacional, en passant par le Couvent San Francisco. Nous montons à la terrasse d’un restaurant, La Bella Vista, offrant une vue à 360°, pour profiter du coucher de soleil et d’un locro, accompagné d’une bière locale.

Le lendemain nous partons à la recherche des trésors précolombiens de la Casa de la Cultura. De multiples statuettes, d’objets d’or, de momies (Rascar Capac ???!), mais aussi beaucoup de pièces d’art religieux, retiennent notre attention pendant quelques heures.

Nous continuons la promenade dans la ville, notamment à travers ses parcs, où nous nous faisons remarquer par un clown donnant un spectacle en plein air, à cause des cheveux de mon octopus. Une foule de badauds regardant le show nous observe en rigolant. Notre espagnol nous sauve la face…et nous retournons à l’hôtel nous remettre de nos émotions.

Le lundi est consacré à la Mitad del Mundo. Ce point fut découvert par les géographes français (notamment M. De la Condamine), comme étant le centre du monde par rapport à la course du soleil. Ils ne s’étaient pas trompés de beaucoup avec leurs instruments de l’époque, puisque le GPS donne la latitude 0°00’00’’ deux cents mètres plus loin. Un musée, l’Inti Nan, a été construit autour de ce coin. Nous la parcourons avec une guide super sympa, et un couple étrange formé d’une Equatorienne et d’un Suisse plus que bizarre. La guide nous raconte tout des Shuars, que l’on nommait auparavant Jivaros, autrement connu par leur réputation de réducteurs de têtes. La technique est simple : découpez la tête de votre ennemi, retirez le crâne, faites bouillir la « peau » dans une grande marmite, faites sécher, et accrochez sur une pique ou en pendentif ! Un ornement des plus raffinés… D’autres tribus toujours vivaces peuplent apparemment l’Amazonie. Mais qui s’y risque n’en revient jamais, ces Indiens étant très forts à la chasse à l’étranger avec des lances parfumées au curare. La suite du musée est consacrée au point central du monde.

Une série de petites expériences nous en démontre l’exactitude : eau qui tourne dans le sens horaire dans l’hémisphère sud, et antihoraire dans l’hémisphère nord, et qui trombe tout droit sur l’équateur (et oui, plus de force de Coriolis !!). Elle nous fait marcher les yeux fermés sur la ligne : notre corps est irrésistiblement attiré d’un côté ou de l’autre. Etape finale : faire tenir un œuf sur un clou, pile sur la ligne équatoriale. Johann y parvient, et se voit donc remettre un diplôme dont il est très fier !! Ce n’est pas donné à tout le monde d’arriver à cette prouesse, je peux en témoigner.

Nous laissons là ces petits exercices, et retournons à Quito pour profiter encore un peu de la ville, avant de partir pour Riobamba.

 

RIOBAMBA

Lors de notre arrivée à Riobamba, nous partons à la recherche de 3 choses essentielles : une chambre pour passer dormir, une laverie pour laver nos vêtements et une excursion VTT pour notre cadeau d’anniversaires respectifs.

L’hôtel est rapidement trouvé : Hôtel Impérial. Après négociation du prix puisque l’hôtel est en travaux et que nous sommes en basse saison, nous paierons 14 dollars par nuit. Très bien !

La laverie, nous la cherchons quelque peu, mais y parvenons. La pesée de nos affaires nous indique 7 kg, autant dire qu’il était temps !. Nous paierons 3,20 dollars. Très très bien !

Et enfin, Pro Bici pour notre excursion en VTT sur le volcan Chimborazo. Et là….bbsssssiiiiiiiiiuuuuuuu (le son d’un vinyle qui ralentit), nous rencontrons Francky le gérant qui parle, qui parle, qui parle...puis nous montre les photos, les photos, les photos…et nous explique comment faire du vélo, du vélo, du vélo !!! Au bout de deux heures de « discussion », nous trouvons une excuse pour nous échapper de ce moulin à parole qui tourne leenntteeemmmeennnttt. Quoi qu’il en soit, nous reviendrons le voir le lendemain pour acheter ce tour de VTT car il est le plus intéressant, le moins cher et nous pouvons négocier !!!

Nous choisissons notre circuit (36 km, en 4 h), nos vélos, notre casque et payons 100 dollars pour deux (ah oui quand même !) et négocions une visite gratuite de la forêt aux arbres à papier (normalement 5 dollars/pers). Le rendez-vous est fixé au jour d’après, à 8h00, plus ou moins précise. En attendant, nous visitons la ville. Riobamba est une ville récente car la ville coloniale a été entièrement détruite lors d’une éruption du volcan Chimborazo. Les rues sont larges, la place centrale jolie mais quelconque, et voilà le tour est fait. Nous rentrons à l’hôtel pour nous reposer et regarder un match de football important : PSG ­Barcelone. Résultat 2-­ 2.

Jeudi 4 avril, 7h00, à la douche….froide !!! Tiens, j’ai payé pour avoir de l’eau chaude, non ? Je sors pour voir avec le gérant qui me dit que « oui oui il y de l’eau chaude mais il faut attendre ». Au bout de 5 minutes, tant pis, pas de douche ce matin pour Johann (Alix la courageuse en prend une !), et en route pour le volcan Chimborazo qui culmine à 6 310 mètres au dessus du niveau de la mer et qui est le plus haut sommet du monde depuis le centre de la Terre. Après 1h30 de voiture et 45 minutes de marche à 4000 mètre d’altitude en plein vent glacial, nous arrivons à la forêt de papier. Nous observons les arbres, prenons des photos du volcan, de la mer de nuages et en voiture Simone  ;-)  direction le premier refuge du parc situé à 4 800 mètres. Notre guide, Mario, nous propose de grimper au second refuge, à 5 000 mètres d’altitude, soit plus haut que le Mont Blanc. Nous partons tous les deux, lui il nous attend. Il me donne un talkie-walkie pour le tenir informé de notre avancée. Le pas est lent, le cœur bat vite, très vite et notre souffle est coupé par l’altitude et par la beauté du paysage. Nous faisons une halte au refuge pour boire un thé à la coca pour moi et un chocolat chaud pour Alix. Nous redescendons tranquillement rejoindre Mario qui nous équipe pour nous lancer sur les pentes du volcan. Listo ! Nous enfourchons nos engins et zou, c’est parti pour 1 000 mètre de dénivelé. TROP BIEN !!!! Alix, en mode mamie : « J’ai pas envie de tomber », et moi, en mode « fonce mon bonhomme » : Ca déchire !!

Le chemin continue encore et encore et encore jusqu’à El Cuartel, un site Inca, pour nous reposer les bras et manger notre sandwich. Les Incas y venaient pour se prélasser au soleil et vénérer le Chimborazo. Nous les honorons sur les pierres un moment. Fin de la pause, nous repartons pour finir notre excursion jusqu’au village de San Pablo situé à 2 600 mètres d’altitude que nous atteignons à 16h00, exténués, mais avec le sourire découpé jusqu’aux oreilles. Un joli cadeau d’anniversaire !!

Vendredi matin, nous partons en direction de Cuenca avec comme objectif la visite de la ville et une balade dans la Parc Cajas. (Vous allez nous prendre pour des sportifs !!!).

 

CUENCA

Nous arrivons à Cuenca de nuit. Un petit tour dans la ville, parce qu’on a pris le mauvais bus, nous laisse entrevoir qu’elle mérite bien sa réputation de plus belle ville d’Equateur. Les Espagnols ont en fait tout détruit de l’ancienne ville inca, Tomebamba, pour y imposer l’architecture coloniale et les rues pavées. Aujourd’hui tout à fait conservée, elle alterne calme le matin, circulation dense l’après-midi, et frénésie la nuit, puisque les jeunes envahissent les rues et les bars les soirs de weekend. Nous, on en profite au contraire pour se reposer, tout en se baladant tranquillement en admirant les façades colorées.

Le dimanche soir, nous nous sommes offert un petit dîner pour nos anniversaires dans un restaurant traditionnel. Du poulet pour Alix, mais cette fois cuisiné avec une sauce à la crème et aux champignons, et pour Johann, un plat typique comprenant : un filet de porc taille XXL, du boudin aux herbes, une omelette au mote (un genre spécial de gros maïs), une croquette de pomme de terre, et de la salade pour la forme. Comme nous sommes gourmands, nous n’avons pu nous empêcher de prendre un dessert. Un classique brownie-glace-chantilly-fraise pour Alix, et a priori un léger yaourt aux fruits pour Johann. Sauf que la coupe contenait 500 grammes de fruits (fraises, bananes, ananas, pêches), et 500 ml de yaourt. « Je vais exploser !!! ». Vite, au lit !!

Le lundi, après quelques difficultés, nous avons trouvé un bus qui nous a largués au refuge Toreadora à l’entrée du parc Cajas. Etalé au cœur des montagnes, lacs et tourbières d’origine glaciaire, le parc offre un paysage qui rappelle étrangement l’Ecosse sauf qu’il y a des lamas à la place des moutons. Bien emmitouflés (il fait froid !!), nous partons gravir le plus haut sommet qui culmine à 4 200 mètres. Trois heures de marche et un petit pique-nique dans le brouillard des cimes, et nous parvenons à bout de cette escapade. Ce n’est pas de l’alpinisme, ou plutôt de l’andinisme, mais ça grimpe sec et ça descend à pic. Le chemin un peu technique, nous fait bien mal aux jambes. Nous continuons à nous promener autour du lac, puis nous décidons de rentrer.

Nous apercevons un bus au loin sur la route, nous courons pour l’intercepter. Un sprint sur une côte à 4 000 mètres de haut, ben mon vieux !!...  Une heure de bus, puis encore une heure de marche dans la ville, et nous rentrons tout crottés faire nos sacs pour préparer le passage de la frontière péruvienne.

 

Nous passerons par Vilcabamba et La Balsa pour rejoindre Jàen au Pérou. Suite des aventures… surtout pour le passage de frontière…de nombreuses turpitudes.

 

Au final, l’Equateur, c’était génial ! Quelle surprise pour un pays qui n’était pas originellement dans nos projets. La descente de la Cordillère des Andes, le VTT, les petites randos, c’était super, surtout dans des paysages magnifiques. Et puis les Equatoriens sont les plus gentils et chaleureux de tous ceux qu’on a rencontrés jusqu’à présent, et le poulet n’est plus le plat unique. :-)