Panama... On a marché sur les eaux!

02/03/2013 16:42

PANAMA CIUDAD

Après 15h de bus, 2 films de Jean-Claude Van Damne et 2 de Jet Li, un passage de frontière qui a pris encore presque 3 heures, nous avons débarqué à 4h du matin à Panama City. Nous avions convenu avec Soledad (une amie de Paris) de nous retrouver à la station de bus, puisqu'elle y arrivait 1h après nous. Nous trouvons un hôtel, posons nos sacs et prenons une douche bien méritée.

Nous sommes dans Casco Viejo, un quartier ancien et colonial de la ville. Vers 8h00, les rues s'animent, et nous voyons se déployer la cohorte d'ouvriers qui oeuvrent à la rénovation des multiples bâtiments vétustes mais pleins de charme.Les femmes mènent la danse, elles sont nombreuses à diriger les travaux...du boulot en perspective? La ville est en chantier, et les voussoirs que nous avons aperçus le long de la route en venant semblent être destinés à la construction du nouveau métro.

La chaleur nous pousse à nous promener le long de la mer, sous une tonnelle ombragée. Au loin derrière la digue en construction, se dessinent les silhouettes des hauts et nombreux gratte-ciel de la nouvelle ville. Le spectacle est saisissant : ce mini-Manhattan détone avec tout ce que nous avions vu précédemment. Le canal semble apporter un certain nombre de richesses...

 

CANAL DE PANAMA

C'est ce que nous partons vérifier le lendemain à l'écluse de Miraflores. Une visite au musée du canal la veille nous a appris, entre autres, les choses suivantes : après l'échec des Français, le chantier du canal a été repris au début du 20 siècle par les Américains. Deux ingénieurs civils se sont succédé à la tête des travaux, mais s'ils ont dessiné et mis au point un ouvrage qui n'a pas bougé depuis, l'ampleur du travail, la fièvre jaune et d'autres désagréments ont eu raison de leur motivation. Le gouvernement américain a donc confié à l'armée le soin de poursuivre les travaux, ce qui a conduit en 1914 à l'inauguration de ce gigantesque ouvrage. Des millions de mètres cubes de terres excavées et de béton coulé, la construction de 3 écluses permettant le passage de tankers, offrent, moyennant finance, la traversée de 80 km entre l'Atlantique et la Pacifique. L'écluse de Miraflores où nous nous sommes rendus est la première du côté Pacifique. Les bateaux entrant par là passent le matin, et ceux venant de la côte Atlantique en sortent l'après-midi. L'organisation est précise mais ne nécessite pas tant de personnel : le bateau entre dans l'écluse guidé par les 6 locomotives situées sur le chemin de halage. L'écluse se vide ou se remplit suivant le sens, les locomotives tirent le bateau sur encore quelques mètres avant qu'un bateau poussoir ne prenne le relais. Nous sommes restés 4 heures à observer la baller de ces géants des mers. Le prix du passage est évalué au poids. Le record du passage le moins coûteux est détenu par l'américain Richard Halliburton, qui a traversé le canal à la nage, ne payant donc que pour son propre poids, soit 0,36 US$.

Derrière l'écluse, le chantier du second canal bat son plein. L'élargissement du canal et la construction de nouvelles écluses doivent augmenter les capacités actuelles, en permettant aux super-tankers de passer. L'inauguration est prévue pour 2014, année du centenaire du canal.

Pendant ce temps à l'hôtel, notre passage en Colombie se précisait. Le nonchalant et sympathique Daniel nous avait mis en contact avec Estefania, une organisatrice de traversée en voilier de la mer des Caraïbes. Nous avions opté pour le Mani Moana, un voilier de 36 pieds accueillant 6 passagers. La date du départ était fixée au lundi 25 février. En attendant, nous avons continué à profiter de la ville, que nous avons appréciée. Son modernisme et la richesse évidente amenée par le canal cohabitent avec une culture centre américaine bien présente, jusqu'aux ruines de la première ville détruite par les pirates encerclées des hauts buildings. Des chicken bus, où la musique latino braille, des gens partout dans la rue la journée, des vendeurs ambulants en tout genre, la touche centre américain est bien présente!

Nous avons mangés deux fois dans le plus vieux restaurant de la ville, inconnu des circuits touristiques, où le Che Guevara était lui-même venu. La ville brasse et bouillonne, les chantiers en cours vont donner du travail et impulser un dynamisme pour plusieurs années à venir.
 On y reste ?? Non. Il fait un peu trop chaud, toute l'année... Nous allons continuer notre chemin, et voir si quelque chose nous plaît plus ailleurs. Mais on ne sait jamais....

 

TRAVERSEE PANAMA / COLOMBIE

L'ailleurs commence donc par le voilier. Nous voilà partis pour cette rocambolesque aventure le lundi matin. Départ prévu à 5h15 en 4x4. Départ réel à 6h00... normal. Après une pause, 3h00 d'une route qui n'a de route que le nom et l'estomac retourné par le chaos du chemin, nous parvenons à El Porvenir pour prendre une lancha (barque à moteur). 2h00 de navigation entre les nombreuses Iles San Blas, pour certaines habitées par les indiens Kuna, et nous parvenons à notre voilier : Le Nothern Drifter. Ha tiens ?! Ce n'est pas le Mani Moana ! On passe les sacs d'un bateau à l'autre. Le capitaine Sebastian nous accueille avec son petit chien de 5 mois, Chico. Premier problème :  il n'y a que 6 couchettes et nous sommes 8. Un hollandais est donc gentiment prié de bien vouloir trouver un autre bateau, et le capitaine dormira sur le pont. Il repart ainsi sur la lancha qui nous a amenés, avec notre capitaine parti régler les procédures adminsitratives de sortie du territoire. Il nous indique qu'il en a pour quelques heures, mais qu'un repas nous attend sur l'ile en face et qu'une cloche nous préviendra quand ce sera prêt.

OK. Nous voilà 6 inconnus sur un voilier de 10 m de long et 3 m de large prêt à passer 5 jours ensemble. Nous en profitos pour faire connaissance. Il y a :

  • Mickaël, un Hollandais de 26 ans,
  • Fabienne, une Belge de 29 ans
  • David, un Belge de 29 ans,
  • Lutz, un Allemand de 21 ans,
  • Alix, une Française de 27 ans,
  • Johann, un Français de 29 ans.

Personne n'a jamais mis les pieds sur un voilier et les discussions vont bon train sur "Qui sera le premier à vomir?". Nous profitons de la beauté du lieu : eau bleu turquoise, iles de sable blanc plantées de cocotier et d'autres voiliers ayant jeté l'ancre aux alentours. A priori, pas de requins en vue. Tant mieux puisque c'est à la nage que nous devons rejoindre l'île pour déjeuner. C'est un plat de langouste et une gamelle de riz qui nous accueille. Une demie-langouste chacun, et des grosses en plus ! Waaaah..ça commence bien!!

La digestion amorcée, les uns partent armés de palmes, masques et tuba explorer les coraux autour de l'île, et les autres remontent sur le bateau. Ceux qui palment aperçoivent une raie manta magnifique de 1,50 m  d'envergure, des poissons multicolores, des langoustes et des étoiles de mers, tandis que les moussaillons du bateau font plus ample connaissance avec la capitaine. Il s'avère que ce dernier effectue la traversée pour la première fois seul sur son voilier, dans le sens Panama-Colombie, que la météo prévoit des vagues de 4 à 5 mètres, et un vent de 25 noeuds. Bon... Un voilier, ça flotte, pas de panique. Y'en a qui traversent bien l'Atlantique...

On nous a installés à l'avant du bateau. Le soir, on ouvre nos petites bières sur le pont, et là, sous les étoiles, on n'a qu'une hâte, c'est de partir voguer sur les flots comme des pirates. Si ça ce n'est pas le bonheur, ça y ressemble quand même beaucoup! On a un sentiment de liberté époustouflant.

Pour le dîner, c'est Fabienne qui régale: pâtes aux 4 fromages! La pemière nuit se passe sans problème bercés par le roulis tranquille de l'eau sous le ciel étoilé.

Le lendemain matin, Sebastian nous prépare un petit déjeuner royal: chorizo, brouillade et arepas (sorte de crêpe épaisse de maïs fourrée au fromage). Les passeports n'étant toujours pas revenus (que passa hermano?), Sebastian nous prévient qu'on reste là encore un jour. Pas de problème, on repart arpenter les coraux qu'on ne connaissait pas encore. Le capitaine achète des poissons à des pêcheurs venus accoster une petite barque à notre voilier, et nous les dégustons sur l'île, où nous passons l'après-midi à boire du rhum. Le soir, Mickael nous prépare des pancakes. On se couche tôt car le lendemain on met les voiles à 5h30 pour une autre île. Le soleil levé, on se prépare donc au départ.: fermez les écoutilles, rangez tout ce qui dépasse, arrimez la grand voile et souquez ferme moussaillons, nous partons!!...

Après 2 ou 3h, nous arrivons à notre nouveau point d'ancrage, une autre île des San Blas. Des dauphins!!!! Et hop! Tout le monde à l'eau, sauf Alix la froussarde qui tâche de voir si parmi les dauphins, un intrus à dentition tranchante ne s'est pas glissé... Rassurée elle finit par plonger mais les dauphins sont partis. Qu'à cela ne tienne, les fonds ressemblent à des aquariums géants, on palme donc des heures durant. Quand l'heure du déjeuner sonne, c'est avec bonheur que nous nous rendons compte que Sebastian a encore négocié des langoustes avec la famille vivant sur l'île. Le ventre bien rempli, nous pataugeons encore un peu avant de retrouver le bateau pour préparer le grand départ le lendemain matin. Dernier repas chaud, Fabienne se dévoue encore: ce sera des pâtes bolognaise.

C'est peu tranquille qu'Alix s'endort, la courte traversée du matin ayant prouvé qu'elle est bien sensible au mal de mer. La pirate en culottes courtes...

 

Jeudi 28 février 2013, 8h00, Iles San Blas: nous levons l'ancre direction Cartagena de Indias, Colombie.

Installés à l'avant du bateau, sur le pont, nous nous apprêtons à pourfendre les vagues, et épions la mer à la recherche d'un pavillon ennemi. Les canons sont prêts, les matelots aussi, Chico est arnaché, et les cales pleines de trésor, nous partons... Attends...Non non non! On n'est pas dans un film de pirates..Et puis, le bateau avance à à peine 10km/h. Et puis, les vagues commencent un peu à travailler l'estomac d'Alix. Ok Jack Sparrow, retourne à l'arrière du bateau! Plus personne ne parle, entre contemplation, méditation et estomacation...

Tout le monde avale une pastille contre le mal de mer. Cela n'empêche qu'au bout de quelques heures, certains passent la tête par dessus-bord pour s'alléger quelque peu. 3 sur 6 ont vomi, mais pas Alix, qui pour une fois ne dit mot pendant 24h (chose rarissime). Johann devient le second du capitaine, étant l'un des rares à l'aise sur le bateau. Il reste éveillé la nuit entière pour surveiller d'éventuels bateaux à tribord ou babord, il tient la barre, enfin essaie, lorsque le pilotage automatique n'est plus possible à cause des vents tournant, et il assure également à merveille son rôle d'infirmière nounou d'Alix.

Au bout de près de 2 jours de voyages, nous apercevons les constructions modernes de Cartagena se dessinant dans la pénombre. Chouette, nous arrivons!! Alix est maintenant debout accrochée au bastingage... Hé non, encore 2 heures... Les deux balises d'entrée du port marquent la fin du voyage en pleine mer. Sebastian tente de jeter l'ancre dans la marina. Que nenni! Elle est coincée. on s'amarre donc à un catamaran pour se reposer quelques heures sur une eau calme, sans vagues.

Au total, 42 heures, 8 minutes et 12 secondes, seuls au monde à traverser une mer des caraïbes bleu turquoise (même la nuit), accompagnés de dauphins et de lucioles de vagues: quel voyage MAGNIFIQUE !!!!!!!!!

20 000 dollars pour un voilier: pourquoi pas? Plus 10 dollars de pastilles pour Alix.

 

Nous posons le pied sur le monde terrestre au petit matin, dans le port de Cartagena de Indias, notre point d'accès au continent sud américain. Ouais, l'aventure continue!!!!!!!!!!!!!!!!